La désintermédiation concerne également le monde du conseil.
Portée par l’appétit croissant des consultants pour un exercice libéral de leur métier, la désintermédiation ouvre aux clients des prestations de conseil un accès direct à des compétences expertes, sans avoir à supporter la refacturation de coûts de structure, ou se faire imposer un mode opératoire trop contraint.
Mais il faut le reconnaître, la plupart des cabinets de conseil de “l’ancien monde” investissaient et investissent encore dans le recrutement, la formation, et d’une certaine manière dans l’homologation des collaborateurs proposés en intervention chez les clients.
Pour une entreprise utilisatrice faire son marché auprès d’une offre pléthorique de consultants indépendants est un challenge. Comment s’assurer du professionnalisme d’un travailleur indépendant, sans parler des risques juridiques de requalification de la relation ?
Des accords directs entre une entreprise donneur d’ordre et un travailleur indépendant du monde du conseil existent bien sûr et continueront d’exister de manière significative, en reposant sur des chaînes de confiance en réseau, quand il ne s’agit pas de faire travailler sous forme libérale un ancien collaborateur cumulant une retraite et un emploi.
Mais le recours direct à un travailleur indépendant peut faire hésiter beaucoup de donneurs d’ordres.
Une réponse est apportée par des structures (“plateformes”) qui se proposent comme tiers de confiance entre les entreprises utilisatrices et les consultants indépendants.
Les plateformes de consultants prônent la “révolution du conseil”.
Fédérer, ou simplement référencer des consultants indépendants qui auront été préalablement sélectionnés, apporter une visibilité à des talents, et offrir un suivi qualité aux clients, voici quelques-unes des utilités des plateformes de consultants qui se sont développées en Europe depuis environ six ans.
Il faut noter que la constitution de pools de consultants indépendants peut également concerner des cabinets traditionnels qui complètent ainsi leur force de travail ou des grands comptes qui confient à leur Direction des ressources humaines la gestion d’une équipe de freelances, à côté de la gestion des salariés.
Cette forme d’organisation en “cluster” d’indépendants doit faire avec le caractère libéral des troupes comme avec les exigences des clients qui aimeraient obtenir autant de garanties qu’avec les cabinets de conseil traditionnel mais désormais avec un prix sensiblement plus faible. Complexe !
Le danger est alors de réduire la prestation à sa plus simple expression. On n’est pas loin de l’intérim dans certains cas avec une standardisation des commandes sur des intitulés de postes plutôt que sur l’analyse de problématiques auxquelles il faut répondre.
Quelles pistes pour apporter de la satisfaction à toutes les parties ?
Les plateformes portent une promesse de liberté de fonctionnement et de coûts réduits. Mais il n’a jamais été dit que le client devenait moins exigeant pour autant :
- Si l’on réduit le taux d’encadrement du consultant en mission, par rapport aux cabinets de conseil traditionnels, il faut être d’autant plus exigeant sur le niveau de maturité et d’autonomie de l’intervenant.
- Pour la même raison, il faut privilégier les profils ayant déjà une expérience libérale significative, acquise par exemple dans une société de services ou de conseil.
- Pour que le statut libéral ne soit pas synonyme de fragilité qui pèserait sur la sérénité des missions, la priorité doit être donnée aux intervenants motivés par une situation indépendante, qu’ils ont choisie.
- L’intervenant est tout autant un client pour la plateforme que le client final utilisateur de la prestation, et la plateforme et ses partenaires doivent investir sur lui, comme un agent gère un talent, à défaut d’une véritable gestion de carrière.
- L’appariement entre les missions et les consultants est plus une affaire d’expérience et d’analyse que d’intelligence artificielle (au moins en l’état de ladite intelligence artificielle), à ce titre les algorithmes de matching automatiques laissent pour l’instant rêveurs, sauf à revendiquer que l’objectif est de supprimer toute interaction humaine entre la plateforme et ses talents, par philosophie, ou tout simplement parce que la plateforme est dépassée par le nombre.
- Compte tenu des prix serrés pratiqués dans l’univers concurrentiel des plateformes, il devient difficile de financer un encadrement complet de mission au quotidien, la qualité promise est celle du recrutement des consultants, de la sincérité de la relation qui les unit à la plateforme et facilite les alertes et remontées d’information, du sérieux de l’analyse préalable du contexte d’intervention, et des enquêtes menées auprès des entreprises.
- Certains plateformes disposent de véritables chefs de projet qui analysent les besoins des entreprises clientes, orientent vers une solution et le choix de compétences, et s’assurent de la satisfaction du client au long de l’intervention.